Awhad al-dîn Balyânî, originaire de la région de
Shîrâz (Iran), mort en 1288, est un des
plus grands maîtres spirituels du Soufisme.
(extraits de l’Epitre sur l’Unicité Absolue)
« C'est en raison de tout cela que le Prophète -
sur Lui la Grâce et la Paix ! - a dit : « Celui qui se connaît Soi-même
connaît son Seigneur ». Il a dit aussi : « J'ai connu mon Seigneur par
mon Seigneur ». Ce que le Prophète
indique par-là, c'est que tu n'es pas « toi » mais que tu es
« Lui » et qu'il n'y a pas de « toi » ; et non pas qu'il
entre en toi ou sort de toi, ou que tu entres en Lui ou sort de Lui. »
« Cela ne signifie pas davantage que tu possèdes
l'être et que tu es qualifié par tel ou tel attribut - non, définitivement non ! Ce
qu'il a voulu dire, c'est que tu es totalement dépourvu d'être et que jamais tu
ne « seras », que ce soit par toi-même, ou par Lui, ou en Lui, ou
avec Lui. »
« On ne peut dire de toi, ni que tu cesses
d'être, ni que tu es. Tu es Lui et Il est toi, sans aucune de ces
imperfections. Si tu connais ton « être » de cette façon, alors tu
connais Dieu ; et sinon, tu ne Le connais pas ! »
« Lorsque ce secret se dévoile à toi, tu sais que
tu n'es pas « ce qui est autre que Dieu » mais que tu es toi-même le
But de ta quête, que tu n'as nul besoin de l'extinction (pour y parvenir), que
tu n'as jamais cessé et ne cesseras jamais d'être, au-delà de tout
« quand » et de tout moment, ainsi que nous l'avons déjà
mentionné : tu vois Ses attributs comme tes attributs, ton extérieur comme Son
Nom « l'Apparent », ton intérieur comme Son Nom « le
Caché », ton commencement comme Son Nom « le Premier » et ton
terme comme Son Nom « le Dernier », sans le moindre doute ou la
moindre hésitation à ce sujet. Tu vois Ses attributs comme tiens et Son essence
comme ton essence, sans que tu aies à devenir Lui ou qu'Il ait à devenir toi à
quelque degré que ce soit. »
« La plupart de ceux qui se prétendent des
connaisseurs subordonnent la connaissance de Dieu à l'extinction de l'être et à « l'extinction de
l'extinction ». C'est là une erreur et un manque de discernement manifeste
; la connaissance de Dieu n'exige, ni extinction de l'être, ni extinction de
cette extinction, car les choses n'ont pas d'être, et ce qui n'a pas d'être ne
peut donc s'éteindre, puisque l'extinction suppose l'affirmation préalable que
ce qui s'éteint était. Si tu te connais comme n'étant pas et (par conséquent
comme) ne cessant pas d'être, alors tu connais Dieu ; et sinon, tu ne Le connais
pas ! »
« Ne pense donc pas que (pour Le connaître) tu
dois d'abord cesser d'être : car si cette extinction était nécessaire, cela
signifierait que tu Le voiles. Il serait par conséquent voilé par « autre
que Lui », ce qui impliquerait nécessairement qu'un autre que Lui peut
l'emporter sur Lui et L'empêcher d'être vu. C'est là une erreur et un manque de
discernement : ainsi que nous l'avons déjà mentionné, Son voile n'est rien
d'autre que Son Unicité et Sa singularité. Voilà pourquoi il est licite à celui
qui parvient à la Vérité essentielle de dire : « Je suis la Vérité »
ou « gloire à Moi ! ».
« Nul n'est véritablement parvenu jusqu'à Lui
aussi longtemps qu'il ne voit ses attributs comme les attributs de Dieu et son
essence comme l'essence de Dieu ; cela sans qu'il y ait infusion en Dieu ou effusion,
à partir de Lui, de Son essence et de Ses attributs et sans qu'il y ait non
plus extinction par rapport à Dieu ou permanence en Lui. Il se voit comme ayant
toujours été dépourvu d'être propre, et non pas comme l'ayant eu, puis perdu. »
« Il n'y a de soi que le Soi, il n'y a d'être que
Son Etre. Le Prophète - sur Lui la Grâce et la Paix ! - a fait allusion à cela
lorsqu'il a dit : « N'insultez pas le Temps, car Dieu est le Temps »,
affirmant ainsi que la transcendance de Dieu - qu'il soit exalté et béni -
exclut tout associé, égal ou pareil. »
« Quand se découvre le secret d'un seul atome se
découvre aussi le secret de toutes les choses existenciées, apparentes ou
cachées, et tu cesses de voir les deux mondes comme autres que Dieu ; leurs
noms et ce qu'ils nomment sont dépourvus de réalité. Ou plutôt : leurs noms et
ce qu'ils nomment, et leur existence même sont Lui, sans le moindre doute. »
« Tu ne vois pas Dieu comme ayant jamais créé une chose
quelconque mais comme étant « chaque jour à une œuvre », laquelle
tantôt Le manifeste et tantôt L'occulte, et cela en dehors de toute modalité
concevable : Car « Il est le Premier et le Dernier, l'Apparent et le Caché
et Il est Savant à l'égard de toute chose ». Il se manifeste par Son
Unicité et se cache par Sa Singularité. Il est le Premier par Son Essence et
Son Immutabilité et le Dernier par Sa permanence éternelle. Il est l'être même
du Nom « le Premier » et du Nom « le Dernier » du Nom
« l'Apparent » et du Nom « le Caché ». Il est à Lui-même le
Nom et le Nommé. »
« De même qu'il est nécessaire qu'Il soit, il est
nécessaire que ce qui est « autre que Lui » ne soit pas. En effet, ce
que tu crois être « autre que Lui » n'est pas « autre que
Lui ». « L'autre que Lui » est Lui ; Sa transcendance exclut
qu'un « autre que Lui » soit véritablement « autre » :
« l'autre que Lui » est Lui sans qu'il y ait réellement altérité, que
ce soit « avec Lui », ou « en Lui », intérieurement ou
extérieurement. »
« Celui qui comprend cet exemple sait qu'il n'y a
en fait ni union, ni séparation ; que le connaisseur est Lui et que le connu
est Lui ; que celui qui voit est Lui et que ce qui est vu est Lui ; que celui
qui arrive est Lui et que ce à quoi il arrive est Lui. »
« Nul autre que Lui ne parvient à Lui, nul autre
que Lui ne se sépare de Lui. Quiconque comprend cela est totalement exempt de
l'idolâtrie de l'idolâtrie ; quiconque ne l'a pas compris n'a pas même respiré
le parfum de cette libération de l'idolâtrie. »
« Sache, en résumé,
que celui qui voit et ce qui est vu, celui qui trouve et ce qui est trouvé,
celui qui sait et ce qui est su, Celui qui existencie et ce qui est existencié,
celui qui perçoit et ce qui est perçu ne sont qu'Un. »
« Il voit, connaît,
perçoit Son Etre par Son Etre, au-delà de toute modalité et de toute forme de
vision, de connaissance ou de perception. De même que Son Etre transcende tout
« comment », de même aussi la vision, la connaissance ou la
perception qu'Il a de Lui-même sont sans « comment. »
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire